Aide juridictionnelle : les avocats reprennent du service

Leur mobilisation a été entendue. Dans le département, qui compte 450 avocats la grève a été totale. Après près de trois semaines de mobilisation contre le projet de réforme de l’aide juridictionnelle, un accord a été conclu, mercredi 28 octobre, entre les représentants des avocats et de la chancellerie. Le Conseil national des barreaux (CNB) a appelé à une levée immédiate de la grève qui touchait mercredi 159 des 164 barreaux. En Val d’Oise, le mot d’ordre a été suivi et la grève est « momentanément suspendue ». Après avoir renoncé à taxer ces caisses pour financer la réforme, Christiane Taubira a annoncé hier une augmentation de la rémunération des avocats participant à l’aide juridictionnelle. La révision du barème de ces prestations payées par l’Etat initialement envisagée par la chancellerie se traduisait dans de nombreux cas par une baisse de rémunération des avocats, ce qui constituait l’un des principaux points de crispation.

La grève des avocats contre le projet de réforme de l’aide juridictionnelle a été suivie par l’immense majorité des barreaux de France. Dans le Val d’Oise, la mobilisation a été très active également. Lundi encore, répondant à l’appel du conseil national des barreaux, quelque 140 avocats s’étaient rassemblés, manifestant pour la 3e fois devant le tribunal de grande instance de Pontoise afin de protester contre la réforme de l’aide juridictionnelle, réunis autour du bâtonnier, Maître Frédéric Zajac. Durant plusieurs jours, plus aucune affaire n’a été plaidée. Conséquence : un encombrement des tribunaux encore plus importants et aucun avocat d’office désigné.

Pourquoi cette grogne ? Créée en 1972 et renforcée en 1991, l’aide juridictionnelle (AJ) attribue aux justiciables les plus démunis un soutien financier de l’Etat pour payer les frais de justice. Christiane Taubira a introduit plusieurs modifications de ce système dans le projet de loi de finances 2016, provoquant un mouvement de colère.

Face à cette fronde nationale, la ministre de la Justice avait finalement fait marche arrière la semaine dernière sur un premier point qui concernait le prélèvement des caisses gérées par les avocats (Carpa) pour financer le budget de l’aide juridictionnelle. En leur demandant de contribuer au financement de cette aide (les prélèvements prévus portaient sur 5 millions d’euros en 2016 et 10 millions en 2017, sur les intérêts générés par ces Carpa), la ministre de la Justice avait déclenché la colère de la profession. « C’est un premier point de satisfaction, puisque cette mesure a été abandonnée, précise Dominique Le Brun, avocat au barreau de Pontoise, membre du Conseil de l’ordre chargé des relations avec les entreprises. Il n’était pas question pour les avocats de payer un impôt pour travailler ! La seconde mesure envisagée ne nous convient pas davantage, c’est pour cela que nous poursuivons le mouvement », nous confiait-il mardi.

La ténacité des avocats a finalement payé. Le ministère de la Justice et le Conseil national des barreaux (CNB) ont signé hier un protocole d’accord qui prévoit en revanche une hausse de la rémunération des avocats au titre de l’AJ, sans clore le débat sur l’aide juridictionnelle. Selon le compromis, la rémunération des avocats au titre de l’AJ est immédiatement revalorisée, une première depuis 2007 : l’unité de valeur (UV) correspondant à une demi-heure de travail augmentera en moyenne de 12,6%, précise le ministère dans un communiqué. Le gouvernement s’engage également à augmenter le budget de l’aide juridictionnelle, qui sera porté de 375 millions d’euros en 2015 à 400 millions en 2016. Des réunions régulières auront lieu avec la profession pour suivre la mise en oeuvre de la réforme. Avocats et ministère sont convenus de réfléchir dans un deuxième temps à une nouvelle étape, avec une contractualisation complémentaire et un dispositif assurant la pérennité du financement de l’AJ.