L’audience solennelle du Tribunal de Commerce de Pontoise s’est tenue fin janvier. L’occasion d’énoncer des chiffres clé qui donnent une tendance sur la conjoncture économique : 15 041 créations d’entreprises en 2024 (+ 15,90% par rapport à 2023) et 17 956 décisions rendues en 2024 (contentieux général et procédures collectives). La prévention et difficultés des entreprises (744 entretiens) s’est poursuivie : 46% des dossiers traités ont permis aux chefs d’entreprise de prendre conscience des problématiques qui ont été repérées par la Chambre de prévention. Un chiffre moins positif : 1 180 redressements/liquidations soit 30,8% de plus par rapport à 2023. Le Tribunal s’est aussi vu confier des dossiers emblématiques dès le 1er février 2024 : celui de la société ATOS sise à BEZONS, société de 97 000 salariés et réalisant un chiffre d’affaires de 12 Milliards d’euros, traité à Pontoise jusqu’à fin mai 2024 puis délocalisé au Tribunal de Commerce Spécialisé (TCS) de Nanterre pour mener à bien la sauvegarde sollicitée et obtenue. Quelques sauvetages aussi : la société UNYCHOS avec l’adoption d’un plan savamment élaboré avec la mise en place des classes affectées ; Le Grand Cercle ; l’entreprise Sebbin, le club sportif les Jokers ; la société Telma, la société Cubyn.
Pour 2025, a précisé Yves Charon, président du Tribunal, « nous sommes dans la continuité des années antérieures : rigueur, efficacité, dévouement, déontologie. Comme le disait Camus : « la justice n’est pas seulement un métier, mais une chaleur d’âme » citation encore plus à propos concernant nos juges consulaires qui exercent leur tâche bénévolement avec un grand dévouement. La justice doit remplir son rôle : en premier lieu, sanctionner les « tricheurs » ; ceux qui, volontairement, s’abstiennent de régler leurs charges sociales (autant salariales que patronales), ceux qui oublient de régler les impôts. Tous ceux-là, « les indélicats » portent préjudice à la majorité des entrepreneurs « honnêtes » qui se conforment à la législation. En ne sanctionnant pas les tricheurs, on laisse libre cours à une concurrence déloyale qui nuit à tout le monde. La justice se doit être humaine mais non laxiste. L’immobilisme doit être proscrit. On se doit de s’adapter aux nouvelles technologies, telle la numérisation. On se doit de bien connaitre les nouveaux métiers, d’appréhender les nouvelles directives européennes pouvant engendrer des rapports commerciaux et conflits inédits, de veiller à des échanges commerciaux sains où la confiance doit primer, à une concurrence loyale, instaurer ou restaurer une morale des affaires ; cette vision ne peut être considérée comme utopique ; tout citoyen y retrouvera son compte dans tous les domaines de sa vie courante (vivre en bonne intelligence, se loger, se soigner, être éduqué, en final, bien vivre dans un environnement sécurisé). Nous sommes constamment prêts à résoudre les difficultés des entrepreneurs ; encore faut-il qu’ils n’arrivent pas au tribunal « en phase terminale ». Il est possible de contribuer aux sauvetages de ces entrepreneurs en période difficile (accident de la vie, marché en décroissance, défaut d’innovation etc. …) quand sont détectés suffisamment en amont les signes précurseurs d’un naufrage. »
Durant l’audience, Yves Charon a tenu à rendre hommage à quatre juges disparus ces derniers mois : Gérard MAURY qui a assumé la présidence du tribunal pendant 8 ans, Pierre PELLETIER, Albert MAGARIAN, Daniel BRUNO et tout récemment Denis COUPIN, ancien Président du tribunal de commerce.
Pour mieux comprendre le fonctionnement du Tribunal de Commerce
Quatre composantes ou entités distinctes participent au fonctionnement du TC de Pontoise ; ces entités sont structurellement et légalement nécessaires pour assurer toutes les missions du TC. La première entité, ce sont les JUGES qu’on nommera sous le mot générique : LE TRIBUNAL. Le TRIBUNAL, sous l’égide d’un Président élu par ses pairs, dispose en théorie de 49 juges bénévoles dont une vice-Présidente ; ils sont élus par les acteurs du monde économique ; ce sont les juges naturels de l’économie. Les 50 juges sont répartis par chambre de 3 à 5 personnes ; Pontoise compte 10 chambres auxquelles s’ajoute 1 chambre de prévention et une section REFERES ; donc 11 chambres qui se décomposent : 7 chambres sont dédiées au contentieux général ; 5 chambres dites « généralistes » dont l’une très spécifique, appelée chambre « des nouveaux » qui veille à une formation originale et complémentaire à celle de l’ENM pour les nouveaux juges ; 1 chambre de mise en état des affaires nouvelles ; 1 chambre de sanction ; 1 section « REFERES », 3 chambres des procédures collectives ; 1 chambre consacrée à la prévention (les chefs d’entreprises avec ou sans leurs conseils sont reçus en cabinet ; les entretiens sont totalement confidentiels ; Les juges prennent connaissance des affaires, les entendent, tranchent les différends et/ou concilient les parties ; rédigent leurs jugements ; Le TRIBUNAL dispose en outre de 2 personnes affectées à différentes tâches administratives dont le secrétariat du Président ;
La deuxième « entité », se dénomme : le GREFFE ; c‘est une structure privée, indépendante et indispensabled’une trentaine de personnes dirigée par 4 greffiers en chef associés avec des commis greffiers qui composent également la structure ; La troisième « entité » est le PARQUET ; il est présent aux audiences des procédures collectives et aux audiences des sanctions ; les requêtes Parquet et la procédure engagée ont pour vocation à sanctionner les chefs d’entreprise indélicats ; La quatrième « entité », ce sont l’ensemble des mandataires et auxiliaires de justice ; on retrouve ces professionnels tout au long des procédures amiables ou judiciaires engagées devant notre TRIBUNAL ; Les Mandataires ad’hoc, les administrateurs judiciaires, les mandataires judiciaires, les commissaires de justice, les experts judiciaires ; Tous, en participation et sous le contrôle du juge commissaire, mettent en œuvre les modalités de restructuration, les modalités de cession, les modalités de liquidation si nécessaire ; leurs missions sont essentielles et elles se doivent d’être efficientes et rapides ; en particulier lorsqu’il s’agit de préparer les états des créances salariales destinées au règlement des salaires par les AGS ; LES CONCILIATEURS DE JUSTICE DELEGUES AU TC : Ces conciliateurs sont au nombre de 4 et ils sont conciliateurs délégués auprès du TC ; Mme la présidente, Régine Van Daele est la référente au pôle judiciaire ; elle contrôle et valide les dossiers des candidats conciliateurs potentiels (anciens juges pour la plupart). Enfin, certains membres du TRIBUNAL assurent un rôle de sentinelle auprès de la structure APESA, association d’aide psychologique dédiée aux personnes en souffrance aigue lors d’un dépôt de bilan ou de difficulté entrepreneuriale ; jusqu’en 2024, l’ancien Président Gérard Maury, décédé, dirigeait cette association.